lundi 6 juillet 2015

Grosses épées et fourberies

J'ai découvert aujourd'hui le "Book Fight Club" de Bookeen.

Répondre sur Twitter en 140 caractères était trop court, je n'ai pas de compte Facebook, donc voici :

Les Rois Maudits

Maurice Druon (de l'Académie Française) fut (entre autres) écrivain et on lui doit la fresque historique des Rois Maudits. Même si, comme dit Dumas, on peut violer l'histoire pourvu qu'on lui fasse de beaux enfants, Druon est resté dans cette oeuvre assez respectueux des événements (sûrement plus que Dumas, qui a largement ignoré ce qui ne l’arrangeait pas).
En commençant son cycle avec la chute des Templiers sur ordre de Philippe le Bel, il revisite ensuite toute la fin de la dynastie des capétiens directs et la montée des Valois sur le trône de France (qui n'est pas encore celui de France et de Navarre).
La scène qui rendra ce cycle célèbre est l'exécution de Jacques de Molay, le dernier des maîtres du Temple, et la malédiction (apocryphe) qu'il lance depuis son bûcher, prédisant la mort de ses accusateurs (le roi de France, son chancelier et le pape) et les maudissant jusqu'à la 13e génération. Mais il évoque aussi les événements de la Tour de Nesle (qui avaient déjà servis de trame à Dumas). Les remous de cet adultère princier vont mêler la petite histoire à la grande.
J'ai lu les rois Maudits il y a plus de 10 ans maintenant. J'en garde le souvenir d'une roman intéressant mais long, trop long sur la fin, avec peut-être un manque de souffle épique (si je me souviens bien, j'avais (re)lu les trois mousquetaires juste avant, ce qui peut jouer). Les personnages sont là, mais ils manquent de profondeur, d'humanité. (Je n'ai vu aucune des adaptions télévisées, je suis trop jeune pour celle de 1972, et la bande-annonce de celle de 2005 ne m'a attiré à l'époque).

le Trône de Fer 

D'un autre coté, Georges R R Martin n'est pas un romancier historique ni un académicien. C'est un écrivain de science-fiction et de fantasy, qui a aussi été journaliste et scénariste. C'est également un lecteur de Druon et il reconnait l'inspiration apportée par les Rois Maudits dans le Chant de Glace et de Feu (A Song of Ice and Fire, titre original du cycle, l'éditeur français a nommé la série avec le titre qu'il a donné au 1er tome (le Trône de Fer ) - qui en anglais correspond à la première partie de A Game of Thrones).
Le cycle s'ouvre sur une mort. Ned Stark qui, dans un cycle de fantasy conventionnel, serait le héros, meurt à la fin du premier tome. Les rôles féminins ne sont pas des potiches, ni des éléments de décor même si le rôle des femmes dans cette société médiévale, est dur. Elles sont des reproductrices, destinées à perpétuer la lignée d'un époux qu'elles n'ont pas choisi. Elles sont le prix d'une alliance politique ou des otages assurant la bonne conduite de leur famille. Le pouvoir qu'elles gagnent s'exerce généralement en coulisse, comme conseillères d'un époux, d'un fils ou d'un amant (Daenerys est l'exception). Quand aux personnages masculins, que dire si ce n'est qu'au jeu des trônes, on gagne ou on meurt.
On est loin de la série de fantasy classique. Pas de quête initiatique, pas de chevalier à l'armure étincelante sauvant le monde d'un vil roi-sorcier (et gagnant la main de la princesse au passage). C'est une série sans héros,où les personnages ont tous une part d'ombre et une part de lumière. Et sans doute pour ça, c'est une série terriblement contemporaine et adulte. L'adaptation télévisuelle à ses défauts, elle ne respecte pas toujours les romans (chaque média a son rythme propre)
Par ailleurs, le fait de sortir des contraintes de l'Histoire permet à Martin une bien plus grande liberté dans son roman, même si on sent que les éléments "réalistes" (combats à l'épée, relations entre grandes familles, économies) viennent de bases historiques classiques. Martin reconnait lui-même s'être inspiré (entre autres, et en vrac), non seulement des rois Maudits mais aussi de la guerre des Deux Roses anglaise ou du "Black Dinner" écossais.

Donc, pour moi, le vainqueur est le Trône de Fer de Georges R. R. Martin.

PS: oui, j'aime beaucoup les romans de cape et d'épée, je n'ai découvert la fantasy et la SF qu'après les Trois Mousquetaires

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